TF histoire courte, conte et légende
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TF histoire courte, conte et légende
Bonjour
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bonjour se sujet est pour écrie des histoires courtes les contes et légendes.
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Dernière édition par luz le Mar 23 Juil - 22:54, édité 2 fois
Re: TF histoire courte, conte et légende
Le Poirier de Misère
Charles Deulin
Charles Deulin
Au temps jadis, il y avait au village de Vicq, sur les bords de l’Escaut, une bonne femme nommée Misère qui allait quémander de porte en porte, et qui paraissait aussi vieille que le péché originel.
En ce temps-là, le village de Vicq ne valait guère mieux qu’un hameau : il croupissait au bord d’un marécage, et on n’y voyait que quelques maigres censes couvertes de joncs.
Misère habitait à l’écart une pauvre cassine en pisé, où elle n’avait pour toute société qu’un chien, qui s’appelait Faro, et pour tout bien qu’un bâton et une besace, que trop souvent elle rapportait aux trois quarts vide.
La vérité est de dire cependant qu’elle possédait encore dans un petit closeau, derrière sa hutte, un arbre, un seul. Cet arbre était un poirier si beau qu’on ne vit jamais rien de tel depuis le fameux pommier du paradis terrestre.
Le seul plaisir que Misère goûtât en ce monde était de manger des fruits de son jardin, c’est-à-dire de son poirier ; malheureusement, les garçonnets du village venaient marauder dans son clos.
Tous les jours que Dieu fait, Misère allait quêter avec Faro ; mais à l’automne Faro restait à la maison pour garder les poires, et c’était un crève-cœur pour tous les deux, car la pauvre femme et le pauvre chien s’aimaient de grande amitié.
Or, il vint un hiver où, deux mois durant, il gela à pierre fendre. Il chut ensuite tant de neige que les loups quittèrent les bois et entrèrent dans les maisons. Ce fut une terrible désolation dans le pays, et Misère et Faro en souffrirent plus que les autres.
Un soir que le vent hurbêlait et que la neige tourbillonnait, les malheureux se réchauffaient l’un contre l’autre près de l’âtre éteint, quand on frappa à la porte.
Chaque fois que quelqu’un s’approchait de la chaumine, Faro aboyait avec colère, croyant que c’étaient les petits maraudeurs. Ce soir-là, au contraire, il se mit à japper doucement et à remuer la queue en signe de joie.
« Pour l’amour de Dieu ! fit une voix plaintive, ouvrez à un pauvre homme qui meurt de froid et de faim.
— Haussez le loquet ! cria Misère. Il ne sera point dit que, par un temps pareil, j’aurai laissé dehors une créature du bon Dieu. »
L’étranger entra : il paraissait encore plus vieux et plus misérable que Misère, et n’avait pour se couvrir qu’un sarrau bleu en haillons.
« Asseyez-vous, mon brave homme, dit Misère. Vous êtes bien mal tombé, mais j’ai encore de quoi vous réchauffer. »
Elle mit au feu sa dernière bûche et donna au vieillard trois morceaux de pain et une poire, qui lui restaient. Bientôt le feu flamba, et le vieillard mangea de grand appétit : or, pendant qu’il mangeait, Faro lui léchait les pieds.
Quand son hôte eut fini, Misère l’enveloppa dans sa vieille couverture de futaine, et le força de se coucher sur sa paillasse, tandis qu’elle-même s’arrangeait pour dormir la tête appuyée sur son escabeau.
Le lendemain, Misère s’éveilla la première :
« Je n’ai plus rien, se dit-elle, et mon hôte va jeûner. Voyons s’il n’y a pas moyen d’aller quêter dans le village. »
Elle mit le nez à la porte : la neige avait cessé de choir et il faisait un clair soleil de printemps. Elle se retourna pour prendre son bâton et vit l’étranger debout et prêt à partir.
« Quoi ! vous partez déjà ? dit-elle.
— Ma mission est remplie, répondit l’inconnu, et il faut que j’aille en rendre compte à mon maître. Je ne suis point ce que je parais : je suis saint Wanon, patron de la paroisse de Condé, et j’ai été envoyé par Dieu le Père pour voir comment mes fidèles pratiquent la charité, qui est la première des vertus chrétiennes. J’ai frappé à l’huis du bourgmestre et des bourgeois de Condé, j’ai frappé à l’huis du seigneur et des censiers de Vicq ; le bourgmestre et les bourgeois de Condé, le seigneur et les censiers de Vicq m’ont laissé grelotter à leur porte. Toi seule as eu pitié de mon malheur, et tu étais aussi malheureuse que moi. Dieu va te le rendre : fais un vœu, il s’accomplira. »
Misère se signa et tomba à genoux :
« Grand saint Wanon, dit-elle, je ne m’étonne plus que Faro vous ait léché les pieds, mais ce n’est point par intérêt que je fais la charité. D’ailleurs, je n’ai besoin de rien.
— Tu es trop dénuée de toutes choses, dit saint Wanon, pour n’avoir point de désirs. Parle, que veux-tu ? »
Misère se taisait :
« Veux-tu une belle cense avec du blé plein le grenier, du bois plein le bûcher et du pain plein la huche ? Veux-tu des trésors, veux-tu des honneurs ? Veux-tu être duchesse, veux-tu être reine de France ? »
Misère secoua la tête.
« Un saint qui se respecte ne doit pas être en reste avec une pauvresse, reprit saint Wanon d’un air piqué. Parle, ou je croirai que tu me refuses par orgueil.
— Puisque vous l’exigez, grand saint Wanon, répondit Misère, j’obéirai. J’ai là, dans mon jardin, un poirier qui me donne de fort belles poires ; par malheur, les jeunes gars du village viennent me les voler, et je suis forcée de laisser le pauvre Faro à la maison pour monter la garde. Faites que quiconque grimpera sur mon poirier n’en puisse descendre sans ma permission.
— Amen ! »
dit saint Wanon en souriant de sa naïveté, et, après lui avoir donné sa bénédiction, il se remit en route.
La bénédiction de saint Wanon porta bonheur à Misère, et dès lors elle ne rentra plus jamais la mallette vide à la maison. Le printemps succéda à l’hiver, l’été au printemps et l’automne à l’été. Les garçonnets, voyant Misère sortir avec Faro, grimpèrent sur le poirier et remplirent leurs poches ; mais au moment de descendre, ils furent bien attrapés.
Misère, au retour, les trouva perchés sur l’arbre, les y laissa longtemps et lâcha Faro à leurs trousses quand elle voulut bien les délivrer. Ils n’osèrent plus revenir, les Vicquelots eux-mêmes évitèrent de passer près de l’arbre ensorcelé, et Misère et Faro vécurent aussi heureux qu’on peut l’être en ce monde.
Vers la fin de l’automne, Misère se réchauffait un jour au soleil dans son jardin, quand elle entendit une voix qui criait : « Misère ! Misère ! Misère ! » Cette voix était si lamentable que la bonne femme se prit à trembler de tous ses membres, et que Faro hurla comme s’il y avait eu un trépassé dans la maison.
Elle se retourna et vit un homme long, maigre, jaune et vieux, vieux comme un patriarche. Cet homme portait une faux aussi longue qu’une perche à houblon. Misère reconnut la Mort.
« Que voulez-vous, l’homme de Dieu, dit-elle d’une voix altérée, et que venez-vous faire avec cette faux ?
— Je viens faire ma besogne. Allons ! ma bonne Misère, ton heure a sonné, il faut me suivre.
— Déjà !
— Déjà ? Mais tu devrais me remercier, toi qui es si pauvre, si vieille et si caduque.
— Pas si pauvre ni si vieille que vous le croyez, notre maître. J’ai du pain dans la huche et du bois au bûcher ; je n’aurai que quatre-vingt-quinze ans vienne la Chandeleur ; et, quant à être caduque, je suis aussi droite que vous sur mes jambes, soit dit sans affront.
— Va ! tu seras bien mieux en paradis.
— On sait ce qu’on perd, on ne sait pas ce qu’on gagne au change, dit philosophiquement Misère. D’ailleurs, cela ferait trop de peine à Faro.
— Faro te suivra. Voyons, décide-toi. »
Misère soupira.
« Accordez-moi du moins quelques minutes, que je m’attife un peu : je ne voudrais point faire honte aux gens de là-bas. »
La Mort y consentit.
Misère mit sa belle robe d’indienne à fleurs qu’elle avait depuis plus de trente ans, son blanc bonnet et son vieux mantelet de Silésie, tout usé, mais sans trou ni tache, qu’elle ne revêtait qu’aux fêtes carillonnées.
Tout en s’habillant, elle jeta un dernier coup d’œil sur sa chaumière et avisa le poirier. Une idée singulière lui passa par la tête, et elle ne put s’empêcher de sourire.
« Pendant que je m’apprête, voudriez-vous me rendre un service, l’homme de Dieu ? dit-elle à la Mort. Ce serait de monter sur mon poirier et de me cueillir les trois poires qui restent. Je les mangerai en route.
— Soit ! » dit la Mort, et il monta sur le poirier.
Il cueillit les trois poires et voulut descendre ; mais, à sa grande surprise, il ne put en venir à bout.
« Hé ! Misère ! cria-t-il, aide-moi donc à descendre. Je crois que ce maudit poirier est ensorcelé. »
Misère vint sur le pas de la porte. La Mort faisait des efforts surhumains avec ses longs bras et ses longues jambes ; mais, au fur et à mesure qu’il se détachait de l’arbre, l’arbre, comme s’il eût été vivant, le reprenait et l’embrassait avec ses branches. C’était un spectacle si bouffon, que Misère partit d’un grand éclat de rire.
« Ma foi ! dit-elle, je ne suis point pressée d’aller en paradis. Tu es bien là, mon bonhomme. Restes-y. Le genre humain va me devoir une belle chandelle. »
Et Misère ferma sa porte, et laissa la Mort perché sur son poirier.
Au bout d’un mois, comme la Mort ne faisait plus son service, on fut tout étonné de voir qu’il n’y avait eu aucun décès à Vicq, à Fresnes et à Condé. L’étonnement redoubla à la fin du mois suivant, surtout quand on apprit qu’il en était de même à Valenciennes, à Douai, à Lille et dans toute la Flandre.
On n’avait jamais ouï parler de pareille chose, et, lorsque vint la nouvelle année, on connut par l’almanach qu’il en était arrivé autant en France, en Belgique, en Hollande, ainsi que chez les Autrichiens, les Suédois et les Russiens.
L’année passa, et il fut établi que depuis quinze mois il n’y avait point eu dans le monde entier un seul cas de mort. Tous les malades avaient guéri sans que les médecins sussent comment ni pourquoi, ce qui ne les avait point empêchés de se faire honneur de toutes les cures.
Cette année s’écoula comme la précédente, sans décès, et, quand vint la Saint-Sylvestre, d’un bout de la terre à l’autre les hommes s’embrassèrent et se félicitèrent d’être devenus immortels.
On fit des réjouissances publiques, et il y eut en Flandre une fête comme on n’en avait point vu depuis que le monde est monde.
Les bons Flamands n’ayant plus peur de mourir d’indigestion, ni de goutte, ni d’apoplexie, burent et mangèrent tout leur saoul. On calcula qu’en trois jours chaque homme avait mangé une boisselée de grain, sans compter la viande et les légumes, et bu un brassin de bière, sans compter le genièvre et le brandevin.
J’avoue pour ma part que j’ai peine à le croire, mais toujours est-il que jamais le monde ne fut si heureux, et personne ne soupçonnait Misère d’être la cause de cette félicité universelle : Misère ne s’en vantait point, par modestie.
Tout alla bien durant dix, vingt, trente ans ; mais, au bout de trente ans, il ne fut point rare de voir des vieillards de cent dix et cent vingt ans, ce qui est d’ordinaire l’âge de la dernière décrépitude. Or ceux-ci, accablés d’infirmités, la mémoire usée, aveugles et sourds, privés de goût, de tact et d’odorat, devenus insensibles à toute jouissance, commençaient à trouver que l’immortalité n’est point un si grand bienfait qu’on le croyait d’abord.
On les voyait se traîner au soleil, courbés sur leurs bâtons, le front chenu, le chef branlant, les yeux éteints, toussant, crachant, décharnés, rabougris, ratatinés, semblables à d’énormes limaces. Les femmes étaient encore plus horribles que les hommes.
Les vieillards les plus débiles restaient dans leurs lits, et il n’y avait point de maison où l’on ne trouvât cinq ou six lits où geignaient les aïeuls, au grand ennui de leurs arrière-petits-fils et fils de leurs arrière-petits-fils.
On fut même obligé de les rassembler dans d’immenses hospices où chaque nouvelle génération était occupée à soigner les précédentes, qui ne pouvaient guérir de la vie.
En outre, comme il ne se faisait plus de testaments, il n’y avait plus d’héritages, et les générations nouvelles ne possédaient rien en propre : tous les biens appartenaient de droit aux bisaïeuls et aux trisaïeuls, qui ne pouvaient en jouir.
Sous des rois invalides, les gouvernements s’affaiblirent, les lois se relâchèrent ; et bientôt les immortels, certains de ne point aller en enfer, s’abandonnèrent à tous les crimes : ils pillaient, volaient, violaient, incendiaient, mais, hélas ! ils ne pouvaient assassiner.
Dans chaque royaume le cri de « Vive le roi ! » devint un cri séditieux et fut défendu sous les peines les plus sévères, à l’exception de la peine de mort.
Ce n’est point tout : comme les animaux ne mouraient pas plus que les hommes, bientôt la terre regorgea tellement d’habitants, qu’elle ne put les nourrir ; il vint une horrible famine, et les hommes, errant demi-nus par les campagnes, faute d’un toit pour abriter leur tête, souffrirent cruellement de la faim, sans pouvoir en mourir.
Si Misère avait connu cet effroyable désastre, elle n’eût point voulu le prolonger, même au prix de la vie ; mais, habitués de longue date aux privations et aux infirmités, elle et Faro en pâtissaient moins que les autres : puis ils étaient devenus quasi sourds et aveugles, et Misère ne se rendait pas bien compte de ce qui se passait autour d’elle.
Alors les hommes mirent autant d’ardeur à chercher le trépas qu’ils en avaient mis jadis à le fuir. On eut recours aux poisons les plus subtils et aux engins les plus meurtriers ; mais engins et poisons ne firent qu’endommager le corps sans le détruire.
On décréta des guerres formidables : d’un commun accord, pour se rendre le service de s’anéantir mutuellement, les nations se ruèrent les unes sur les autres ; mais on se fit un mal affreux sans parvenir à tuer un seul homme.
On rassembla un congrès de la mort : les médecins y vinrent des cinq parties du monde ; il en vint des blancs, des jaunes, des noirs, des cuivrés, et ils cherchèrent tous ensemble un remède contre la vie, sans pouvoir le trouver.
On proposa dix millions de francs de récompense pour quiconque le découvrirait : tous les docteurs écrivirent des brochures sur la vie, comme ils en avaient écrit sur le choléra, et ils ne guérirent pas plus cette maladie que l’autre.
C’était une calamité plus épouvantable que le déluge, car elle sévissait plus longuement, et on ne prévoyait point qu’elle dût avoir une fin.
Or, à cette époque, il y avait à Condé un médecin fort savant, qui parlait presque toujours en latin et qu’on appelait le docteur De Profundis. C’était un très honnête homme qui avait expédié beaucoup de monde au bon temps, et qui était désolé de ne pouvoir plus guérir personne.
Un soir qu’il revenait de dîner chez le mayeur de Vicq, comme il avait trop bu d’un coup, il s’égara dans le marais. Le hasard le conduisit près du jardin de Misère, et il entendit une voix plaintive qui disait :
« Oh ! qui me délivrera et qui délivrera la terre de l’immortalité, cent fois pire que la peste ! »
Le savant docteur leva les yeux, et sa joie n’eut d’égale que sa surprise : il avait reconnu la Mort.
« Comment ! c’est vous, mon vieil ami, lui dit-il, quid agis in hac pyro perché ?
— Rien du tout, docteur De Profundis, et c’est ce qui m’afflige, répondit la Mort ; donnez-moi donc la main que je descende. »
Le bon docteur lui tendit la main, et la Mort fit un tel effort pour se détacher de l’arbre, qu’il enleva le docteur de terre. Le poirier saisit aussi celui-ci et l’enlaça de ses branches. De Profundis eut beau se débattre, il dut tenir compagnie à la Mort.
On fut fort étonné de ne point le voir le lendemain et le surlendemain. Comme il ne donnait pas signe de vie, on le fit afficher et mettre dans la gazette, mais ce fut peine perdue.
De Profundis était le premier homme qui eût disparu de Condé depuis de longues années. Avait-il donc trouvé le secret de mourir, et lui, jadis si généreux, se l’était-il réservé pour lui seul ?
Tous les Condéens sortirent de la ville pour se mettre à sa recherche : ils fouillèrent si bien la campagne en tous sens qu’ils arrivèrent au jardin de Misère. À leur approche, le docteur agita son mouchoir en signe de détresse.
« Par ici ! leur cria-t-il, par ici, mes amis : le voici, voici la Mort ! Je l’avais bien dit dans ma brochure, qu’on le retrouverait dans le marais de Vicq, le vrai berceau du choléra. Je le tiens enfin, mais non possumus descendere de ce maudit poirier.
— Vive la Mort ! » firent en chœur les Condéens, et ils s’approchèrent sans défiance.
Les premiers arrivés tendirent la main à la Mort et au docteur ; mais, ainsi que le docteur, ils furent enlevés de terre et saisis par les branches de l’arbre.
Bientôt le poirier fut tout couvert d’hommes. Chose extraordinaire, il grandissait au fur et à mesure qu’il agrippait les gens. Ceux qui vinrent ensuite prirent les autres par les pieds, d’autres se suspendirent à ceux-ci, et tous ensemble formèrent les anneaux de plusieurs chaînes d’hommes qui s’étendaient à la distance d’une portée de crosse. Mais c’est en vain que les derniers, restés à terre, saquaient de toutes leurs forces, ils ne pouvaient arracher leurs amis du maudit arbre.
L’idée leur vint alors d’abattre le poirier : ils allèrent quérir des haches et commencèrent à le frapper tous ensemble ; hélas ! on ne voyait seulement pas la marque des coups.
Ils se regardaient tout penauds, et ne sachant plus à quel saint se vouer, quand Misère vint au bruit et en demanda la cause. On lui expliqua ce qui se passait depuis si longtemps, et elle comprit le mal qu’elle avait fait sans le vouloir.
« Moi seule puis délivrer la Mort, dit-elle, et j’y consens, mais à une condition, c’est que la Mort ne viendra nous chercher, Faro et moi, que quand je l’aurai appelé trois fois.
— Tope, dit la Mort, j’obtiendrai de saint Wanon qu’il arrange l’affaire avec le bon Dieu.
— Descendez, je vous le permets ! » cria Misère ; et la Mort, le docteur et les autres tombèrent du poirier comme des poires trop mûres.
La Mort se mit à sa besogne sans désemparer, et expédia les plus pressés ; mais chacun voulait passer le premier. Le brave homme vit qu’il aurait trop à faire. Il leva pour l’aider une armée de médecins et en nomma général en chef le docteur De Profundis.
Quelques jours suffirent à la Mort et au docteur pour débarrasser la terre de l’excès des vivants, et tout rentra dans l’ordre. Tous les hommes âgés de plus de cent ans eurent droit de mourir et moururent, à l’exception de Misère qui se tint coite, et qui depuis n’a point encore appelé trois fois la Mort.
Voilà pourquoi, dit-on, Misère est toujours dans le monde.
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Dernière édition par luz le Mar 23 Juil - 21:03, édité 2 fois
Re: TF histoire courte, conte et légende
voici un conte russe triste mais beaux aussi
- Mais pourquoi es-tu couché ici, chien ?
- Je meurs de faim! Tu vois la justice des hommes d'aujourd'hui. Tant que tu as de la force, ils te nourrissent et ils te donnent à boire, mais quand la vieillesse te retire tes forces, ils te mettent tout simplement à la porte.
- Chien, alors tu veux manger?
- Et comment !
- Allez, viens avec moi, je vais te gâter.
Et ils partirent ensemble. En chemin, ils croisèrent un cheval.
- Regarde-moi bien, - dit l'ours au chien, en grattant la terre avec sa patte.
- Chien, chien!
- Mais quoi?
- Regarde mes yeux. Ne sont-ils pas rouges de colère?
- Oui, ils sont rouges, ours.
L'ours continuait à gratter la terre pour faire monter sa colère.
- Chien, chien! Et ma fourrure n'est elle pas hérissée de colère?
- Bien sûr qu'elle est hérissée, ours!
- Chien, chien! Et ma queue ne se dresse-t'elle pas de colère?
- Mais si, elle se dresse!
Alors chargé de colère, l'ours bondit sur le cheval, s'agrippa à son flanc et le fit tomber à terre. Puis, il le lacéra de ses griffes et dit:
- Voilà chien, maintenant tu as de quoi manger autant que tu veux. Quand tu n'auras plus rien, viens me voir.
Le chien reprit goût à la vie, et il n'avait aucun regret. Quand il eut tout mangé et que la faim le reprit, il se précipita chez l'ours.
- Eh bien, mon frère, tu as tout mangé?
- Oui, et la faim est revenue.
- Pourquoi jeûner? Sais-tu où vos femmes vont cueillir les légumes.
- Bien sûr, je le sais!
- Alors, allons-y! Je m'approcherai délicatement de ta maîtresse, et je lui subtiliserai son enfant dans le berceau. Toi, tu courras à mes trousses, et tu me le reprendras. Après cela, tu le rapporteras à sa mère et tu verras; elle te redonnera ta pâtée comme avant.
C'était d'accord. L'ours accourut, s'approcha à pas de velours, et vola l'enfant dans son berceau. L'enfant hurlait, les nourrices se lancèrent à sa poursuite, mais en vain. Elles rebroussèrent finalement chemin. La mère pleurait, les femmes étaient torturées de tristesse.Venant d'on ne sait où, le chien se mit à l'ouvrage, il poursuivit l'ours, reprit l'enfant et le rapporta.
- Regardez, - dirent les femmes - ce vieux chien rapporte l'enfant!
On courut à sa rencontre. La mère était pleine de joie.
- Désormais, - dit-elle - pour rien au monde je ne me séparerai de ce chien!
Elle l'amena à la maison, lui versa du lait, lui coupa du pain et le lui donna:
- Allez, mange!
Et elle dit à son mari:
- Eh bien, non, mon époux! Tu n'aurais jamais du chasser notre chien. Il faut le garder et le nourrir. Il a sauvé notre enfant des griffes de l'ours. Et dire que tu disais qu'il n'avait plus de force!
Le chien se rétablit et prit même quelque embonpoint:
- Que Dieu protège l'ours, - se disait -il - lui qui m'a sauvé de la faim.
Et l'ours devint son meilleur ami.
Un jour, le paysan organisa une fête chez lui. Profitant de cette occasion, l'ours rendit visite au chien.
- Salut, chien! Comment vas-tu? Est-ce que tu es bien nourri?
- Dieu soit béni! - répondit le chien - Je vis des jours d'or et de soie. Me permets-tu de régaler? Allons dans l'isba. Mes maîtres font la fête. Ils ne verront pas que tu es là. Entre, et va tout de suite te cacher sous le fourneau. Moi j'irai te chercher quelque chose, et tu vas te régaler.
C'était d'accord. Ils pénétrèrent dans l'isba. Le chien vit que ses maîtres et leurs invités étaient complètement saouls. Il offrit à boire à son copain. L'ours avala un premier verre, puis un deuxième et but jusqu'à en perdre la tête. Les invités se mirent à chanter. L'ours avait aussi envie de pousser la chansonnette. Le chien eut beau le mettre en garde:
- Ne chante pas, tu vas avoir des ennuis!
Rien à faire! L'ours ne pouvait plus se retenir, et, d'une voix puissante, il entonna une chanson à lui. Les invités entendirent ses hurlements, saisirent leur haches, et haro sur l'ours! Celui-ci réussit à s'échapper de justesse, et il s'enfuit à moitié mort.
Le paysan avait aussi un chat. Ce vieux chat ne chassait plus les souris, il ne faisait plus que des bêtises: où qu'il grimpe, c'était pour casser quelque chose ou pour renverser une carafe. Le paysan le chassa de sa maison. Le chien vit comme le chat affamé était malheureux, et il se mit discrètement à lui apporter du pain et de la viande. La maîtresse de maison soupçonna son manège. Un jour, elle le prit sur le fait. Elle le roua de coups, et le sermonna:
- Surtout, n'apporte pas de viande à ce chat! Et ne lui donne pas de pain, non plus!
Trois jours après, le chien sortit de la cour de la ferme et il rencontra le chat qui semblait mal en point:
- Qu'as-tu? - lui dit-il.
- Je meurs de faim. Jusqu'à présent, j'avais mon compte, tant que tu me nourrissais.
- Viens avec moi!
Et les voilà partis tous les deux. Le chien s'approcha d'un troupeau de chevaux et se mit à gratter le sol de sa patte pour se mettre en colère.
- Chat, chat, est-ce que j'ai les yeux rouges?
- Pas vraiment. - répondit le chat.
- Dis-moi qu'ils sont rouges maintenant.
- Eh bien, ils sont rouges! - concéda le chat.
- Chat, chat, et mon poil est-il bien dressé de colère?
- Non, il n'est pas dressé.
- Imbécile, dis-moi qu'il se dresse!
- Bon d'accord, il se dresse.
- Chat, chat, et ma queue est elle bien tendue?
- Eh non, elle n'est pas tendue!
- Imbécile, dis-moi qu'elle est tendue!
- Bon, elle est tendue.
Alors convaincu qu'il avait en lui assez de colère, le chien s'élança contre une jument. Mais la jument lui donna un coup de sabot qui le projeta en arrière. Et il rendit l'âme. Alors le chat s'approcha et lui dit:
- Maintenant je peux te dire la vérité: tes yeux sont rouges de sang, ton poil est hérissé et ta queue est toute tendue. Adieu, chien, mon frère. Moi aussi, je vais mourir.
L'ours, le chien et le chat
Il était une fois un paysan qui avait un bon chien. Mais le chien devint vieux. Il ne pouvait plus aboyer ni assurer la garde de la cour et des granges. Le paysan ne voulait plus nourrir cette bouche inutile. Il le chassa de la ferme. Le chien s'enfuit dans la forêt et se coucha sous un arbre pour mourir. Soudain, arriva un ours, qui lui demanda:- Mais pourquoi es-tu couché ici, chien ?
- Je meurs de faim! Tu vois la justice des hommes d'aujourd'hui. Tant que tu as de la force, ils te nourrissent et ils te donnent à boire, mais quand la vieillesse te retire tes forces, ils te mettent tout simplement à la porte.
- Chien, alors tu veux manger?
- Et comment !
- Allez, viens avec moi, je vais te gâter.
Et ils partirent ensemble. En chemin, ils croisèrent un cheval.
- Regarde-moi bien, - dit l'ours au chien, en grattant la terre avec sa patte.
- Chien, chien!
- Mais quoi?
- Regarde mes yeux. Ne sont-ils pas rouges de colère?
- Oui, ils sont rouges, ours.
L'ours continuait à gratter la terre pour faire monter sa colère.
- Chien, chien! Et ma fourrure n'est elle pas hérissée de colère?
- Bien sûr qu'elle est hérissée, ours!
- Chien, chien! Et ma queue ne se dresse-t'elle pas de colère?
- Mais si, elle se dresse!
Alors chargé de colère, l'ours bondit sur le cheval, s'agrippa à son flanc et le fit tomber à terre. Puis, il le lacéra de ses griffes et dit:
- Voilà chien, maintenant tu as de quoi manger autant que tu veux. Quand tu n'auras plus rien, viens me voir.
Le chien reprit goût à la vie, et il n'avait aucun regret. Quand il eut tout mangé et que la faim le reprit, il se précipita chez l'ours.
- Eh bien, mon frère, tu as tout mangé?
- Oui, et la faim est revenue.
- Pourquoi jeûner? Sais-tu où vos femmes vont cueillir les légumes.
- Bien sûr, je le sais!
- Alors, allons-y! Je m'approcherai délicatement de ta maîtresse, et je lui subtiliserai son enfant dans le berceau. Toi, tu courras à mes trousses, et tu me le reprendras. Après cela, tu le rapporteras à sa mère et tu verras; elle te redonnera ta pâtée comme avant.
C'était d'accord. L'ours accourut, s'approcha à pas de velours, et vola l'enfant dans son berceau. L'enfant hurlait, les nourrices se lancèrent à sa poursuite, mais en vain. Elles rebroussèrent finalement chemin. La mère pleurait, les femmes étaient torturées de tristesse.Venant d'on ne sait où, le chien se mit à l'ouvrage, il poursuivit l'ours, reprit l'enfant et le rapporta.
- Regardez, - dirent les femmes - ce vieux chien rapporte l'enfant!
On courut à sa rencontre. La mère était pleine de joie.
- Désormais, - dit-elle - pour rien au monde je ne me séparerai de ce chien!
Elle l'amena à la maison, lui versa du lait, lui coupa du pain et le lui donna:
- Allez, mange!
Et elle dit à son mari:
- Eh bien, non, mon époux! Tu n'aurais jamais du chasser notre chien. Il faut le garder et le nourrir. Il a sauvé notre enfant des griffes de l'ours. Et dire que tu disais qu'il n'avait plus de force!
Le chien se rétablit et prit même quelque embonpoint:
- Que Dieu protège l'ours, - se disait -il - lui qui m'a sauvé de la faim.
Et l'ours devint son meilleur ami.
Un jour, le paysan organisa une fête chez lui. Profitant de cette occasion, l'ours rendit visite au chien.
- Salut, chien! Comment vas-tu? Est-ce que tu es bien nourri?
- Dieu soit béni! - répondit le chien - Je vis des jours d'or et de soie. Me permets-tu de régaler? Allons dans l'isba. Mes maîtres font la fête. Ils ne verront pas que tu es là. Entre, et va tout de suite te cacher sous le fourneau. Moi j'irai te chercher quelque chose, et tu vas te régaler.
C'était d'accord. Ils pénétrèrent dans l'isba. Le chien vit que ses maîtres et leurs invités étaient complètement saouls. Il offrit à boire à son copain. L'ours avala un premier verre, puis un deuxième et but jusqu'à en perdre la tête. Les invités se mirent à chanter. L'ours avait aussi envie de pousser la chansonnette. Le chien eut beau le mettre en garde:
- Ne chante pas, tu vas avoir des ennuis!
Rien à faire! L'ours ne pouvait plus se retenir, et, d'une voix puissante, il entonna une chanson à lui. Les invités entendirent ses hurlements, saisirent leur haches, et haro sur l'ours! Celui-ci réussit à s'échapper de justesse, et il s'enfuit à moitié mort.
Le paysan avait aussi un chat. Ce vieux chat ne chassait plus les souris, il ne faisait plus que des bêtises: où qu'il grimpe, c'était pour casser quelque chose ou pour renverser une carafe. Le paysan le chassa de sa maison. Le chien vit comme le chat affamé était malheureux, et il se mit discrètement à lui apporter du pain et de la viande. La maîtresse de maison soupçonna son manège. Un jour, elle le prit sur le fait. Elle le roua de coups, et le sermonna:
- Surtout, n'apporte pas de viande à ce chat! Et ne lui donne pas de pain, non plus!
Trois jours après, le chien sortit de la cour de la ferme et il rencontra le chat qui semblait mal en point:
- Qu'as-tu? - lui dit-il.
- Je meurs de faim. Jusqu'à présent, j'avais mon compte, tant que tu me nourrissais.
- Viens avec moi!
Et les voilà partis tous les deux. Le chien s'approcha d'un troupeau de chevaux et se mit à gratter le sol de sa patte pour se mettre en colère.
- Chat, chat, est-ce que j'ai les yeux rouges?
- Pas vraiment. - répondit le chat.
- Dis-moi qu'ils sont rouges maintenant.
- Eh bien, ils sont rouges! - concéda le chat.
- Chat, chat, et mon poil est-il bien dressé de colère?
- Non, il n'est pas dressé.
- Imbécile, dis-moi qu'il se dresse!
- Bon d'accord, il se dresse.
- Chat, chat, et ma queue est elle bien tendue?
- Eh non, elle n'est pas tendue!
- Imbécile, dis-moi qu'elle est tendue!
- Bon, elle est tendue.
Alors convaincu qu'il avait en lui assez de colère, le chien s'élança contre une jument. Mais la jument lui donna un coup de sabot qui le projeta en arrière. Et il rendit l'âme. Alors le chat s'approcha et lui dit:
- Maintenant je peux te dire la vérité: tes yeux sont rouges de sang, ton poil est hérissé et ta queue est toute tendue. Adieu, chien, mon frère. Moi aussi, je vais mourir.
Re: TF histoire courte, conte et légende
Encore une histoire un peut triste mais belle.
Ils s'aidaient mutuellement, et vivaient dans l'affection et la bonne entente fraternelle.
Ils gagnaient pauvrement leur vie en allant à la pêche. Chaque matin, dès que pointait le jour, ils prenaient leurs filets et allaient en mer.
Parfois, lorsqu'il leur arrivait de prendre un poisson particulièrement beau, ils ne le vendaient pas, mais le rapportaient chez eux, le faisaient cuire et le mangeaient.
L'aîné, qui avait compassion de son cadet, mettait toujours sur l'assiette de
son frère le corps du poisson entier, ne gardant pour lui que la tête.
Le plus jeune, constatant la répétition du fait, hocha un jour la tête en se demandant pourquoi son aîné ne le laissait pas goûter lui aussi à la tête.
« Serait-ce un morceau particulièrement délicat », se demandait-il.
« Est-ce pour cela que mon frère se le garde toujours ? »
Et ainsi prit naissance dans son coeur un sentiment de haine pour son frère aîné.
Et un jour qu'ils avaient pris place dans leur barque pour aller en haute mer, le plus jeune profita de ce que l'aîné, le dos tourné, se penchait hors de la barque, pour le pousser à l'eau !
« Et maintenant, je pourrai me régaler moi aussi des têtes de poisson !»
se dit le plus jeune en se frottant les mains. Il rapporta le produit de la pêche à la maison, fit frire le plus beau poisson, et se mit tout de suite à attaquer la tête. Mais quoi ? Sur cette tête, il n'y avait pour ainsi dire rien à manger.
Rien que des grosses arêtes comme des os, et pour les joues, elles n'avaient pas un goût particulier.
Ce n'est qu'alors que le cadet comprit que son grand frère l'aimait tant qu'il lui laissait toujours le meilleur, et ne lui donnait jamais la tête qui ne valait rien.
Il pleura amèrement, et courut vers la mer, qui s'étendait là, sombre et triste.
- Frère, ô mon pauvre frère, où es-tu ? criait le cadet, bien malheureux, mais personne ne lui répondit. Seule la mer mugissait, et les vagues se soulevaient.
C'est en vain que le cadet appela son aîné, personne ne lui répondit. Pour
finir, il se décida à aller chercher son frère au fond de la mer. Il sauta à
l'eau, et la surface des flots se referma sur lui pour toujours. Plus personne
ne l'a jamais revu, depuis lors.
On raconte qu'il s'est noyé, et que son âme s'est changée en l'esprit de
l'oiseau pleureur qui fait interminablement des cercles en planant au-dessus de la mer, et en pleurant désespérément son frère perdu.
ce conte nous vient de le jardin du conteur
L'OISEAU PLEUREUR
Deux frères vivaient ensemble. Depuis longtemps, ils avaient enterré leur père et, à part l'un l'autre, ils n'avaient personne au monde. Ils s'aidaient mutuellement, et vivaient dans l'affection et la bonne entente fraternelle.
Ils gagnaient pauvrement leur vie en allant à la pêche. Chaque matin, dès que pointait le jour, ils prenaient leurs filets et allaient en mer.
Parfois, lorsqu'il leur arrivait de prendre un poisson particulièrement beau, ils ne le vendaient pas, mais le rapportaient chez eux, le faisaient cuire et le mangeaient.
L'aîné, qui avait compassion de son cadet, mettait toujours sur l'assiette de
son frère le corps du poisson entier, ne gardant pour lui que la tête.
Le plus jeune, constatant la répétition du fait, hocha un jour la tête en se demandant pourquoi son aîné ne le laissait pas goûter lui aussi à la tête.
« Serait-ce un morceau particulièrement délicat », se demandait-il.
« Est-ce pour cela que mon frère se le garde toujours ? »
Et ainsi prit naissance dans son coeur un sentiment de haine pour son frère aîné.
Et un jour qu'ils avaient pris place dans leur barque pour aller en haute mer, le plus jeune profita de ce que l'aîné, le dos tourné, se penchait hors de la barque, pour le pousser à l'eau !
« Et maintenant, je pourrai me régaler moi aussi des têtes de poisson !»
se dit le plus jeune en se frottant les mains. Il rapporta le produit de la pêche à la maison, fit frire le plus beau poisson, et se mit tout de suite à attaquer la tête. Mais quoi ? Sur cette tête, il n'y avait pour ainsi dire rien à manger.
Rien que des grosses arêtes comme des os, et pour les joues, elles n'avaient pas un goût particulier.
Ce n'est qu'alors que le cadet comprit que son grand frère l'aimait tant qu'il lui laissait toujours le meilleur, et ne lui donnait jamais la tête qui ne valait rien.
Il pleura amèrement, et courut vers la mer, qui s'étendait là, sombre et triste.
- Frère, ô mon pauvre frère, où es-tu ? criait le cadet, bien malheureux, mais personne ne lui répondit. Seule la mer mugissait, et les vagues se soulevaient.
C'est en vain que le cadet appela son aîné, personne ne lui répondit. Pour
finir, il se décida à aller chercher son frère au fond de la mer. Il sauta à
l'eau, et la surface des flots se referma sur lui pour toujours. Plus personne
ne l'a jamais revu, depuis lors.
On raconte qu'il s'est noyé, et que son âme s'est changée en l'esprit de
l'oiseau pleureur qui fait interminablement des cercles en planant au-dessus de la mer, et en pleurant désespérément son frère perdu.
ce conte nous vient de le jardin du conteur
Re: TF histoire courte, conte et légende
Conte d’Allemagne
Heureusement, il était parvenu à une fourche et il résolut de passer la nuit dans ce nid de fortune attaché par les lanières de son fouet afin de ne pas tomber.
Lorsqu’il se réveilla au matin, il recommença son ascension. A midi, il était parvenu à une certaine hauteur dans le branchage sans pour autant voir le sommet de l’arbre. Il grimpait toujours lorsque le soir descendit doucement. L’arbre se déployait en une infinité de branches et ne semblait pas vouloir se terminer. Il s’apprêtait à passer une nuit encore lié par les lanières de son fouet lorsqu’il découvrit un village disposé dans la frondaison de l’arbre.
- D'où viens-tu ? lui demandèrent les paysans, fort surpris à sa vue.
- Je viens d’en bas, répondit le garçon.
- Tu as donc fait un bien long voyage ! dirent les paysans. Reste chez nous, nous trouverons à t’employer.
- L'arbre prend-il fin ici ? demanda le garçon.
- Oh non, le sommet est encore un bon bout plus haut.
- Je ne peux donc pas rester chez vous. Mais j’aimerais manger quelque chose. J’ai tellement faim et je suis si las. Pourrais-je passer la nuit ici ? Demain, je repartirai.
Les paysans lui donnèrent à manger et à boire et le laissèrent dormir chez eux. Au matin, il remercia pour leur bon accueil et il se remit en route le long du tronc.
Le soleil était déjà très haut dans le ciel quand il parvint à un immense château. A l’une des fenêtres, se tenait une superbe jeune fille. Celle-ci paru fort réjouie lorsqu’elle le vit et elle l’invita à venir demeurer chez elle.
- L'arbre prend-il fin ici ? demanda le garçon.
- Oh non, le sommet est encore un bon bout plus haut mais tu ne peux aller plus haut. Je t’en prie, implora-t-elle, reste auprès de moi.
- Que fais-tu ici toute seule ? demanda le garçon.
- Je suis la fille d’un roi mais un enchanteur m’a enfermée ici pour que j’y vive et que j’y meure.
Et elle éclata en gros sanglots.
Le garçon paru ému par les pleurs de la princesse.
- Je veux bien passer un peu de temps auprès de toi et qui sait, peut-être pourrais-je t’aider.
Le garçon pénétra dans le château et comme la fille était belle et gracieuse, elle lui plut chaque jour un peu plus. Il resta à ses côtés, un jour, deux jours, trois jours, une semaine… et le temps s’évanouit pour lui. Ses moindres désirs étaient comblés sans même qu’il ait le besoin d’en parler. Il ne vit jamais l’enchanteur et il vivait heureux dans l’arbre auprès de la princesse.
Tout aurait été pour le mieux si la princesse ne lui avait défendu de pénétrer dans une pièce du château, une chambre située à l’extrême Nord.
Si tu y pénètres, lui avait-elle dit, tu nous rendrais malheureux l’un et l’autre…
Il avait obéi pendant un certain temps mais l’idée d’y aller se faisait un peu plus insistante.
Qu’est-ce que cela peut bien signifier ? Quelle est cette chose qui pourrait nous rendre malheureux ? Je veux le savoir.
Un jour que la princesse était dans sa chambre occupée à broder, il prit les clés suspendues dans la grande salle et s’en alla vers la chambre interdite. Il chercha longtemps la bonne clé et finalement, la lourde porte s’ouvrit. A l’intérieur, il n’y avait rien si ce n’est un corbeau noir fixé sur le mur par trois clous en or. L’un lui traversait le cou et les deux autres retenaient ses ailes.
- Ah ! Enfin te voilà ! Heureusement que tu t’es décidé à venir ! Je suis presque mort de soif ! Donne-moi un peu d’eau qui se trouve dans la cruche posée sur la table sans quoi je périrai !
Le jeune homme réfléchit mais son bon cœur se laissa attendrir. Il pensa qu’en pareille situation, il serait bien heureux qu’on lui donne un peu d’eau.
Il versa une goutte d’eau au corbeau dans le bec du corbeau. A peine avait-elle touché la langue de l’oiseau que le clou qui tenait son cou roula sur le sol.
- Qu’est-ce que cela ? demanda le garçon.
- Ce n’est rien répondit l’animal. Donne-moi encore une goutte. Ne me laisse pas mourir.
- Si tu le veux, dit le garçon qui versa une seconde goutte d’eau sur la langue de l’oiseau.
- Cette fois, c’est le clou qui tenait l’aile droite qui roula sur le sol.
- C’en est assez ! dit le garçon.
- Je t’en supplie. Sois bon avec moi ! Une seule goutte. Donne-moi une seule goutte et puis je te laisserai tranquille.
Lorsque le garçon la lui eut donnée, le troisième clou se détacha aussitôt. L’oiseau, libéré de ses liens, étendit les ailes et s’envola par la fenêtre en croassant.
Le garçon, fort effrayé, courut rapidement hors de la chambre dont il referma à clé la lourde porte. Pourvu que la princesse ne s’en aperçoive pas, se dit-il tout bas. Hélas ! la princesse s’en était aperçue. Au moment où il pénétrait dans la salle où elle se trouvait, elle se piqua au doigt et pâle et tremblante, elle le regarda entrer.
- Tu es allé dans la salle interdite, lui dit-elle. L’enchanteur qui m’a ensorcelé va bientôt arriver pour m’enlever et tu me retrouveras difficilement.
Elle se mit à pleurer et le garçon ne parvint pas à la consoler même lorsqu’il lui promit que où qu’elle soit par le monde, il la retrouverait.
Le lendemain à son réveil, la princesse avait disparu. Il resta durant trois jours et trois nuits à l’attendre mais las d’attendre, il se remit en route. Il grimpa et grimpa encore le long du tronc de l’arbre. Il avançait toujours plus haut dans le branchage jusqu’à ce qu’il soit parvenu à une forêt si dense et si sombre qu’aucun rayon de lumière ne réussissait à pénétrer. Il cherchait sa princesse sans découvrir aucune trace de son passage. Au bout du troisième jour, il aperçut enfin une clarté dans l’obscurité. Il la suivit et ce n’est que trois jours plus tard qu’il parvint dans une clairière où il trouva une petite cabane de chasse. Il y entra et découvrit sa princesse étendue sur son lit.
- Comment as-tu pu me retrouver, s’étonna-t-elle ?
- Ne t’avais-je pas promis de te retrouver où que tu sois dans le monde ? mais ne perdons pas de temps. Il faut fuir avant que l’enchanteur ne revienne te chercher.
Ils coururent à travers la forêt sans se retourner jusqu’à ce que la princesse, épuisée, demande grâce. Ils s’assirent au pied d’un grand chêne et la princesse posa sa tête sur les genoux de son compagnon et s’endormit. Il la contemplait, tout à son bonheur de l’avoir retrouvée lorsqu’il remarqua un petit sac en jute attaché à son cou. Il l’ouvrit et y découvrit une pierre merveilleuse tant par sa couleur que par sa forme. Il s’amusait à laisser des rayons de lumière la traverser, s’émerveillait de ses reflets et la posa finalement dans l’herbe.
Lorsqu’il voulut la reprendre, un corbeau l’avait saisie et voletait de branches en branches.
C’est encore un coup de l’enchanteur, pensa le jeune homme effrayé.
Il entreprit de la récupérer et jeta des pierres en direction de l’oiseau sans jamais l’atteindre. Le corbeau volait de branches en branches ; d’arbres en arbres poursuivi par le garçon. Finalement, il disparut et le garçon voulut revenir vers la princesse. Il ne retrouva jamais son chemin et s’égara plus profondément dans la forêt.
Il avait marché longtemps lorsqu’il rencontra un homme fort beau et richement vêtu. Il lui expliqua qu’il cherchait son amie et lui demanda s’il connaissait un grand chêne.
- Les arbres tel que celui que tu me décris sont nombreux dans la forêt. Viens plutôt avec moi, tu t’en trouveras bien et tu auras tout le temps pour réfléchir à ce qu'il te faut faire pour retrouver ta princesse.
Il suivit l’homme sans prendre attention au chemin qu’il suivait, perdu qu’il était dans ses pensées et ses remords. Mais tout cela ne changeait rien à son chagrin.
Ils arrivèrent bientôt près d’une belle maison blanche où onze jeunes garçons étaient assis autour d’une table richement couverte.
- Maintenant que vous êtes au complet, vous resterez toujours près de moi et vous aurez tout ce que vous désirerez mais au bout de l’année, il vous faudra résoudre les trois énigmes. Celui qui ne le pourra devra mourir alors que celui qui réussira recevra une bourse pleine d’or. Les onze jeunes gens se réjouirent mais le jeune homme se tut et pensa : "Que m’importe de mourir ! La vie ne m’est plus une joie. Mais qui sait si je résous les énigmes si je ne retrouverai pas ma princesse…"
La vie suivait son cours. Les onze jeunes gens vivaient joyeusement alors que le douzième restait silencieux dans son coin, rêvant de sa princesse perdue.
Lorsqu’elle s’était réveillée, la princesse avait bien deviné que l’enchanteur lui avait encore joué un tour. Elle se mit donc en route courageusement dans la forêt et atteint après des jours de marche un petit village où elle se fit construire une petite auberge. Elle fit une belle enseigne où l'on pouvait lire "ici, on reçoit gratuitement ceux qui sont malades, tristes et sans secours " car elle pensait que son bien aimé, reviendrait peut-être un jour, malade et désespéré.
L’année avait passé fort vite sans que les onze garçons de la belle maison n’aient songé aux trois énigmes. Le douzième, au contraire, y pensait de plus en plus.
Un soir, qu’il se sentait anxieux et tourmenté, il s’en alla dans la forêt et s’étendit sous un arbre. Il entendit des oiseaux atterrir sur la cime et il reconnut la voix de son maître qui, il lui sembla était aussi celle du corbeau auquel il avait jadis donné à boire. Il se tint immobile et écouta.
- Demain, dit la voix, nous tuerons douze jeunes garçons dont celui qui a voulu ravir ma princesse. Celle-ci vit seule et triste à mourir mais elle va être mienne pour toujours.
- Comment peux-tu en être si certain ? croassa une autre voix.
- Demain, ils devront résoudre trois énigmes dont ils ne connaissent pas les réponses.
- Croa, croa, croa ! Et que sont ces énigmes ? croassa la troisième voix.
- Ce sont trois toutes petites questions : De quoi est faite la maison ? D’où vient la nourriture ? Pourquoi ne fait-il jamais nuit à l’intérieur de la maison ?
- Croa, croa, croa ! Et quelles sont les réponses ? croassa la seconde voix.
- La maison est faite avec des os d’hommes pécheurs. La nourriture vient de la cuisine du diable et la lumière vient de la pierre que j’ai volé au jeune garçon et qui est suspendue dans la grande salle.
- Croa, croa, croa ! Tous les trois s’envolèrent.
Pour la première fois depuis un an, le garçon passa une excellente nuit.
Le lendemain, le maître appela les douze garçons et leur demanda de se mettre en file, les uns derrière les autres. Il s’installèrent et le jeune homme se plaça le dernier.
- Voici arrivé le jour des énigmes. Répondez-moi les uns après les autres. De quoi est faite la maison ? interrogea le maître.
-De glaise, dit le premier ; de bois dit le second ; de pierres dit le troisième ; de briques dit le quatrième ; de boue dit le cinquième ; de torchis dit le sixième ; de paille dit le septième ; de verre dit le huitième ; de fer dit le neuvième ; de cailloux dit le dixième ; de carton dit le onzième ; d’os d’hommes pécheurs dit le dernier.
- Tu as deviné juste mais passons à la seconde énigme.
- D’où provient la nourriture que vous manger ?
- De la cuisine, dit le premier ; de la forêt dit le second ; de la gargote dit le troisième ; de la voisine dit le quatrième ; des animaux dit le cinquième ; du jardin dit le sixième ; du marché dit le septième ; des arbres dit le huitième ; des racines dit le neuvième ; de la mer dit le dixième ; du ciel dit le onzième ; de la cuisine du diable dit le dernier.
- Tu as deviné juste mais passons à la troisième énigme.
- D’où vient la lumière qui éclaire si vivement la maison jusque dans la nuit ?
- D’une lampe, dit le premier ; du soleil dit le second ; de la lune dit le troisième ; des étoiles dit le quatrième ; du feu dit le cinquième ; de la terre dit le sixième ; de la forge dit le septième ; d’une bougie dit le huitième ; de la foudre dit le neuvième ; de la mer dit le dixième ; du ciel dit le onzième ; de la pierre que tu m’as volée et qui se trouve au plafond dit le dernier.
- Tu as deviné juste. Voici la bourse qui ne s’épuise jamais et il trancha la tête aux onze autres compagnons du jeune homme qui dans l'intervalle s’était précipité dans la grande salle et avait récupéré la pierre de la princesse. Il s'était remis en route, toujours plus haut dans l’arbre, sans grand espoir pourtant de revoir la princesse.
Il errait las, misérable, malheureux lorsqu’il se présenta devant l’auberge construite par la princesse. Il lut l’enseigne mais il avait bien les moyens de payer son gîte grâce à la bourse qui ne se vide jamais. Il entra et fut accueilli par la princesse. Ils ne se reconnurent cependant pas tant les années les avaient changés l’un et l’autre. Une servante le conduisit vers sa chambre et voulut lui faire de la lumière.
- Ce n’est pas la peine, déclara-t-il et il tira de sa poche la pierre lumineuse qui éclaira toute la pièce.
La servante se précipita chez sa maîtresse pour lui raconter le prodige. La princesse très intéressée se rendit auprès de son hôte et lui demanda d’où provenait cette pierre. La question à peine posée, ils se reconnurent à la lumière magique.
Après que la princesse l’eut bien soigné, ils eurent tous deux le désir de retourner dans leur patrie et entreprirent la longue descente vers la terre. Lorsqu’ils furent arrivés tout en bas, ils ne se retrouvèrent rien de paysages qu’ils avaient laissés. Aux champs avaient fait place des gratte-ciel et des autoroutes. Personne ne les reconnut. Leurs parents étaient morts depuis longtemps. Ils se rendirent compte qu’eux aussi étaient devenus bien vieux. Ils tombèrent en poussière et personne ne put jamais expliquer qui ils étaient et d’où ils venaient. A côté du petit tas de cendre, on retrouva la pierre brillante qu’un enfant emporta et personne n’en entendit plus jamais parler.
source le pays de l'imaginaire
L'arbre merveilleux.
Il y était une fois un pauvre garçon qui chaque jour devait garder les cochons. Chaque matin, il les menait dans la forêt toute proche, afin de les engraisser avec les faines des hêtres et les glands des chênes. Il grandissait et se trouvait proche de ses dix-huit ans quand un matin, alors qu’il s’était aventuré un peu plus loin qu’à l’ordinaire, il se trouva au pied d’un grand arbre. Il était si haut que ses branches se perdaient dans les nuages. " Mais qu'est-ce que cet arbre ? Se demanda-t-il. Comme j’aimerais voir le monde depuis le haut de sa cime ! Essayons ! " Il entreprit donc de grimper. Il grimpa et grimpa encore le long du tronc de l’arbre. Il grimpait encore lorsque midi sonna au clocher de la vieille église ; il grimpait toujours lorsque le soleil se coucha sur la plaine. Il grimpait toujours et n’était encore parvenu qu’aux premières branches lorsqu’il fit tout à fait noir. Heureusement, il était parvenu à une fourche et il résolut de passer la nuit dans ce nid de fortune attaché par les lanières de son fouet afin de ne pas tomber.
Lorsqu’il se réveilla au matin, il recommença son ascension. A midi, il était parvenu à une certaine hauteur dans le branchage sans pour autant voir le sommet de l’arbre. Il grimpait toujours lorsque le soir descendit doucement. L’arbre se déployait en une infinité de branches et ne semblait pas vouloir se terminer. Il s’apprêtait à passer une nuit encore lié par les lanières de son fouet lorsqu’il découvrit un village disposé dans la frondaison de l’arbre.
- D'où viens-tu ? lui demandèrent les paysans, fort surpris à sa vue.
- Je viens d’en bas, répondit le garçon.
- Tu as donc fait un bien long voyage ! dirent les paysans. Reste chez nous, nous trouverons à t’employer.
- L'arbre prend-il fin ici ? demanda le garçon.
- Oh non, le sommet est encore un bon bout plus haut.
- Je ne peux donc pas rester chez vous. Mais j’aimerais manger quelque chose. J’ai tellement faim et je suis si las. Pourrais-je passer la nuit ici ? Demain, je repartirai.
Les paysans lui donnèrent à manger et à boire et le laissèrent dormir chez eux. Au matin, il remercia pour leur bon accueil et il se remit en route le long du tronc.
Le soleil était déjà très haut dans le ciel quand il parvint à un immense château. A l’une des fenêtres, se tenait une superbe jeune fille. Celle-ci paru fort réjouie lorsqu’elle le vit et elle l’invita à venir demeurer chez elle.
- L'arbre prend-il fin ici ? demanda le garçon.
- Oh non, le sommet est encore un bon bout plus haut mais tu ne peux aller plus haut. Je t’en prie, implora-t-elle, reste auprès de moi.
- Que fais-tu ici toute seule ? demanda le garçon.
- Je suis la fille d’un roi mais un enchanteur m’a enfermée ici pour que j’y vive et que j’y meure.
Et elle éclata en gros sanglots.
Le garçon paru ému par les pleurs de la princesse.
- Je veux bien passer un peu de temps auprès de toi et qui sait, peut-être pourrais-je t’aider.
Le garçon pénétra dans le château et comme la fille était belle et gracieuse, elle lui plut chaque jour un peu plus. Il resta à ses côtés, un jour, deux jours, trois jours, une semaine… et le temps s’évanouit pour lui. Ses moindres désirs étaient comblés sans même qu’il ait le besoin d’en parler. Il ne vit jamais l’enchanteur et il vivait heureux dans l’arbre auprès de la princesse.
Tout aurait été pour le mieux si la princesse ne lui avait défendu de pénétrer dans une pièce du château, une chambre située à l’extrême Nord.
Si tu y pénètres, lui avait-elle dit, tu nous rendrais malheureux l’un et l’autre…
Il avait obéi pendant un certain temps mais l’idée d’y aller se faisait un peu plus insistante.
Qu’est-ce que cela peut bien signifier ? Quelle est cette chose qui pourrait nous rendre malheureux ? Je veux le savoir.
Un jour que la princesse était dans sa chambre occupée à broder, il prit les clés suspendues dans la grande salle et s’en alla vers la chambre interdite. Il chercha longtemps la bonne clé et finalement, la lourde porte s’ouvrit. A l’intérieur, il n’y avait rien si ce n’est un corbeau noir fixé sur le mur par trois clous en or. L’un lui traversait le cou et les deux autres retenaient ses ailes.
- Ah ! Enfin te voilà ! Heureusement que tu t’es décidé à venir ! Je suis presque mort de soif ! Donne-moi un peu d’eau qui se trouve dans la cruche posée sur la table sans quoi je périrai !
Le jeune homme réfléchit mais son bon cœur se laissa attendrir. Il pensa qu’en pareille situation, il serait bien heureux qu’on lui donne un peu d’eau.
Il versa une goutte d’eau au corbeau dans le bec du corbeau. A peine avait-elle touché la langue de l’oiseau que le clou qui tenait son cou roula sur le sol.
- Qu’est-ce que cela ? demanda le garçon.
- Ce n’est rien répondit l’animal. Donne-moi encore une goutte. Ne me laisse pas mourir.
- Si tu le veux, dit le garçon qui versa une seconde goutte d’eau sur la langue de l’oiseau.
- Cette fois, c’est le clou qui tenait l’aile droite qui roula sur le sol.
- C’en est assez ! dit le garçon.
- Je t’en supplie. Sois bon avec moi ! Une seule goutte. Donne-moi une seule goutte et puis je te laisserai tranquille.
Lorsque le garçon la lui eut donnée, le troisième clou se détacha aussitôt. L’oiseau, libéré de ses liens, étendit les ailes et s’envola par la fenêtre en croassant.
Le garçon, fort effrayé, courut rapidement hors de la chambre dont il referma à clé la lourde porte. Pourvu que la princesse ne s’en aperçoive pas, se dit-il tout bas. Hélas ! la princesse s’en était aperçue. Au moment où il pénétrait dans la salle où elle se trouvait, elle se piqua au doigt et pâle et tremblante, elle le regarda entrer.
- Tu es allé dans la salle interdite, lui dit-elle. L’enchanteur qui m’a ensorcelé va bientôt arriver pour m’enlever et tu me retrouveras difficilement.
Elle se mit à pleurer et le garçon ne parvint pas à la consoler même lorsqu’il lui promit que où qu’elle soit par le monde, il la retrouverait.
Le lendemain à son réveil, la princesse avait disparu. Il resta durant trois jours et trois nuits à l’attendre mais las d’attendre, il se remit en route. Il grimpa et grimpa encore le long du tronc de l’arbre. Il avançait toujours plus haut dans le branchage jusqu’à ce qu’il soit parvenu à une forêt si dense et si sombre qu’aucun rayon de lumière ne réussissait à pénétrer. Il cherchait sa princesse sans découvrir aucune trace de son passage. Au bout du troisième jour, il aperçut enfin une clarté dans l’obscurité. Il la suivit et ce n’est que trois jours plus tard qu’il parvint dans une clairière où il trouva une petite cabane de chasse. Il y entra et découvrit sa princesse étendue sur son lit.
- Comment as-tu pu me retrouver, s’étonna-t-elle ?
- Ne t’avais-je pas promis de te retrouver où que tu sois dans le monde ? mais ne perdons pas de temps. Il faut fuir avant que l’enchanteur ne revienne te chercher.
Ils coururent à travers la forêt sans se retourner jusqu’à ce que la princesse, épuisée, demande grâce. Ils s’assirent au pied d’un grand chêne et la princesse posa sa tête sur les genoux de son compagnon et s’endormit. Il la contemplait, tout à son bonheur de l’avoir retrouvée lorsqu’il remarqua un petit sac en jute attaché à son cou. Il l’ouvrit et y découvrit une pierre merveilleuse tant par sa couleur que par sa forme. Il s’amusait à laisser des rayons de lumière la traverser, s’émerveillait de ses reflets et la posa finalement dans l’herbe.
Lorsqu’il voulut la reprendre, un corbeau l’avait saisie et voletait de branches en branches.
C’est encore un coup de l’enchanteur, pensa le jeune homme effrayé.
Il entreprit de la récupérer et jeta des pierres en direction de l’oiseau sans jamais l’atteindre. Le corbeau volait de branches en branches ; d’arbres en arbres poursuivi par le garçon. Finalement, il disparut et le garçon voulut revenir vers la princesse. Il ne retrouva jamais son chemin et s’égara plus profondément dans la forêt.
Il avait marché longtemps lorsqu’il rencontra un homme fort beau et richement vêtu. Il lui expliqua qu’il cherchait son amie et lui demanda s’il connaissait un grand chêne.
- Les arbres tel que celui que tu me décris sont nombreux dans la forêt. Viens plutôt avec moi, tu t’en trouveras bien et tu auras tout le temps pour réfléchir à ce qu'il te faut faire pour retrouver ta princesse.
Il suivit l’homme sans prendre attention au chemin qu’il suivait, perdu qu’il était dans ses pensées et ses remords. Mais tout cela ne changeait rien à son chagrin.
Ils arrivèrent bientôt près d’une belle maison blanche où onze jeunes garçons étaient assis autour d’une table richement couverte.
- Maintenant que vous êtes au complet, vous resterez toujours près de moi et vous aurez tout ce que vous désirerez mais au bout de l’année, il vous faudra résoudre les trois énigmes. Celui qui ne le pourra devra mourir alors que celui qui réussira recevra une bourse pleine d’or. Les onze jeunes gens se réjouirent mais le jeune homme se tut et pensa : "Que m’importe de mourir ! La vie ne m’est plus une joie. Mais qui sait si je résous les énigmes si je ne retrouverai pas ma princesse…"
La vie suivait son cours. Les onze jeunes gens vivaient joyeusement alors que le douzième restait silencieux dans son coin, rêvant de sa princesse perdue.
Lorsqu’elle s’était réveillée, la princesse avait bien deviné que l’enchanteur lui avait encore joué un tour. Elle se mit donc en route courageusement dans la forêt et atteint après des jours de marche un petit village où elle se fit construire une petite auberge. Elle fit une belle enseigne où l'on pouvait lire "ici, on reçoit gratuitement ceux qui sont malades, tristes et sans secours " car elle pensait que son bien aimé, reviendrait peut-être un jour, malade et désespéré.
L’année avait passé fort vite sans que les onze garçons de la belle maison n’aient songé aux trois énigmes. Le douzième, au contraire, y pensait de plus en plus.
Un soir, qu’il se sentait anxieux et tourmenté, il s’en alla dans la forêt et s’étendit sous un arbre. Il entendit des oiseaux atterrir sur la cime et il reconnut la voix de son maître qui, il lui sembla était aussi celle du corbeau auquel il avait jadis donné à boire. Il se tint immobile et écouta.
- Demain, dit la voix, nous tuerons douze jeunes garçons dont celui qui a voulu ravir ma princesse. Celle-ci vit seule et triste à mourir mais elle va être mienne pour toujours.
- Comment peux-tu en être si certain ? croassa une autre voix.
- Demain, ils devront résoudre trois énigmes dont ils ne connaissent pas les réponses.
- Croa, croa, croa ! Et que sont ces énigmes ? croassa la troisième voix.
- Ce sont trois toutes petites questions : De quoi est faite la maison ? D’où vient la nourriture ? Pourquoi ne fait-il jamais nuit à l’intérieur de la maison ?
- Croa, croa, croa ! Et quelles sont les réponses ? croassa la seconde voix.
- La maison est faite avec des os d’hommes pécheurs. La nourriture vient de la cuisine du diable et la lumière vient de la pierre que j’ai volé au jeune garçon et qui est suspendue dans la grande salle.
- Croa, croa, croa ! Tous les trois s’envolèrent.
Pour la première fois depuis un an, le garçon passa une excellente nuit.
Le lendemain, le maître appela les douze garçons et leur demanda de se mettre en file, les uns derrière les autres. Il s’installèrent et le jeune homme se plaça le dernier.
- Voici arrivé le jour des énigmes. Répondez-moi les uns après les autres. De quoi est faite la maison ? interrogea le maître.
-De glaise, dit le premier ; de bois dit le second ; de pierres dit le troisième ; de briques dit le quatrième ; de boue dit le cinquième ; de torchis dit le sixième ; de paille dit le septième ; de verre dit le huitième ; de fer dit le neuvième ; de cailloux dit le dixième ; de carton dit le onzième ; d’os d’hommes pécheurs dit le dernier.
- Tu as deviné juste mais passons à la seconde énigme.
- D’où provient la nourriture que vous manger ?
- De la cuisine, dit le premier ; de la forêt dit le second ; de la gargote dit le troisième ; de la voisine dit le quatrième ; des animaux dit le cinquième ; du jardin dit le sixième ; du marché dit le septième ; des arbres dit le huitième ; des racines dit le neuvième ; de la mer dit le dixième ; du ciel dit le onzième ; de la cuisine du diable dit le dernier.
- Tu as deviné juste mais passons à la troisième énigme.
- D’où vient la lumière qui éclaire si vivement la maison jusque dans la nuit ?
- D’une lampe, dit le premier ; du soleil dit le second ; de la lune dit le troisième ; des étoiles dit le quatrième ; du feu dit le cinquième ; de la terre dit le sixième ; de la forge dit le septième ; d’une bougie dit le huitième ; de la foudre dit le neuvième ; de la mer dit le dixième ; du ciel dit le onzième ; de la pierre que tu m’as volée et qui se trouve au plafond dit le dernier.
- Tu as deviné juste. Voici la bourse qui ne s’épuise jamais et il trancha la tête aux onze autres compagnons du jeune homme qui dans l'intervalle s’était précipité dans la grande salle et avait récupéré la pierre de la princesse. Il s'était remis en route, toujours plus haut dans l’arbre, sans grand espoir pourtant de revoir la princesse.
Il errait las, misérable, malheureux lorsqu’il se présenta devant l’auberge construite par la princesse. Il lut l’enseigne mais il avait bien les moyens de payer son gîte grâce à la bourse qui ne se vide jamais. Il entra et fut accueilli par la princesse. Ils ne se reconnurent cependant pas tant les années les avaient changés l’un et l’autre. Une servante le conduisit vers sa chambre et voulut lui faire de la lumière.
- Ce n’est pas la peine, déclara-t-il et il tira de sa poche la pierre lumineuse qui éclaira toute la pièce.
La servante se précipita chez sa maîtresse pour lui raconter le prodige. La princesse très intéressée se rendit auprès de son hôte et lui demanda d’où provenait cette pierre. La question à peine posée, ils se reconnurent à la lumière magique.
Après que la princesse l’eut bien soigné, ils eurent tous deux le désir de retourner dans leur patrie et entreprirent la longue descente vers la terre. Lorsqu’ils furent arrivés tout en bas, ils ne se retrouvèrent rien de paysages qu’ils avaient laissés. Aux champs avaient fait place des gratte-ciel et des autoroutes. Personne ne les reconnut. Leurs parents étaient morts depuis longtemps. Ils se rendirent compte qu’eux aussi étaient devenus bien vieux. Ils tombèrent en poussière et personne ne put jamais expliquer qui ils étaient et d’où ils venaient. A côté du petit tas de cendre, on retrouva la pierre brillante qu’un enfant emporta et personne n’en entendit plus jamais parler.
source le pays de l'imaginaire
poli- modo
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le jeux de carte
J'ai déjà rencontrer le gars qui a composé les paroles de ce récit qui est intéressant.
Écouter ceci et vous ne serez pas déçu.
Écouter ceci et vous ne serez pas déçu.
Re: TF histoire courte, conte et légende
Bonjour
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